
La troupe de jeunes danseurs s’exécute pour nous au Centre communautaire Oscar Arnulfo Romero de Nandaime
NANDAIME – Au Nicaragua, la Saint-Valentin parle tant d’amitié que d’amour. Avant la fin de la journée, nous avions trouvé les deux.
Nandaime est une ville paisible de 40 000 habitants – 20 000 dans la zone dite « urbaine » – située au sud de Masaya. Elle ressemble à de nombreuses autres villes coloniales espagnoles construites autour d’une place ouverte avec le bâtiment municipal d’un côté et l’église de l’autre.
Dans un pays où les gens se promènent continuellement dans les rues, nous n’avons pas vu grand monde avant que l’école secondaire locale se vide, vers 11 h 30, pour laisser entrer son deuxième quart.
L’éducation est un défi au Nicaragua, et l’école secondaire locale enseigne à trois différents groupes par jour en quarts consécutifs.
On remarque aussi que l’eau ruisselle un peu partout dans les rues de la ville, pour former une assez grosse rigole là où se trouve le Centre communautaire Oscar Arnulfo Romero. Nandaime n’a pas les moyens d’installer un système d’égouts.
Où qu’on voyage au Nicaragua, le chauffeur d’autobus doit régulièrement s’arrêter pour demander son chemin. Les rues n’ont pas de nom ici et les instructions impliquent souvent de rouler une certaine distance jusqu’à un point de repère, comme une station d’essence ou une bibliothèque pour enfants. La carte touristique de Managua est parsemée de points de repère pour aider les non-initiés à se retrouver. Notre premier guide nous a laissé entendre qu’il fut un temps où les habitants de la région avaient décidé d’utiliser le métal des panneaux de signalisation à meilleur escient.
Tout en fredonnant la chanson de U2, « Where The Streets Have No Name » (Où les rues sont sans nom), nous arrivons au Centre communautaire Romero, où nous sommes chaleureusement accueillis.
Fondé en 1989 par un missionnaire du Québec connu sous le nom de « Santiago », le Centre sert les enfants et les jeunes de la région. Au centre des opérations se trouve une station de radio communautaire gérée par des jeunes. Elle diffuse sa programmation de 6 h à 18 h chaque jour – l’horaire ayant récemment été raccourci à cause du prix de l’électricité.
Aujourd’hui, la station est en rénovation; on y ajoute un deuxième étage pour permettre aux jeunes de Nandaime de faire des productions vidéo. Les fonds proviennent d’une autre agence de développement du Canada.
La station Radio Nandaime est dirigée par la communauté pour la communauté, et souvent dans la communauté pour des émissions en extérieur. On y diffuse des nouvelles deux fois par jour – à 6 h 30 et à midi. Les jeunes s’empressent de dire qu’ils mettent l’accent sur des questions importantes et qu’ils évitent les nouvelles à sensations, comme celles qui impliquent de la violence.
Toute la musique diffusée sur cette station de radio est nicaraguayenne; vous n’entendrez certainement pas Bono pleurer le manque de panneaux de signalisation ici. Toutefois, la communauté peut choisir la musique qui se joue pendant les tribunes téléphoniques à la radio.
Une autre émission, intitulée « Youth Ready To Jump », s’occupe de nouvelles et de questions spécifiques aux jeunes. L’idée est d’encourager les jeunes à discuter afin qu’ils trouvent des solutions aux problèmes recensés.
Aujourd’hui, nous entendons une campagne publicitaire recommandant vivement aux gens de ne pas jeter leurs ordures à l’extérieur quand il pleut.
L’émission « Maracas » met en valeur les divers talents retrouvés à Nandaime dans le cadre d’entrevues avec différents artistes, tels que des peintres et des danseurs.
À notre sortie de la station, un groupe de jeunes nous attendent dans le théâtre de plein air du centre pour nous remettre à chacun nos propres maracas, sur lesquels ils ont gravé nos noms. Les maracas sont un symbole ici; à l’instar de l’émission, les graines contenues dans cet instrument représentent les nombreux talents identifiés dans leur propre communauté.
Mais le centre est bien plus qu’une station de radio. On y trouve un groupe de théâtre qui joue des pièces parlant des problèmes sociaux les plus pressants. On y trouve aussi une troupe de danse. Les jeunes gens y apprennent plusieurs choses, comme par exemple la confection de hamacs, une source de revenus stable pour bien des gens dans la région.
Et pour finir, les étudiants y apprennent la valeur de la citoyenneté. Cet apprentissage parle de leurs propres droits et responsabilités envers la communauté. Il leur permet aussi d’améliorer leurs aptitudes – et plus particulièrement pour renforcer leur estime de soi, dans une région où perdre espoir est si facile. Un étudiant nous a dit qu’après avoir suivi le programme de citoyenneté, il avait décidé d’entrer dans la police pour pouvoir aider les gens.
Les jeunes sont encouragés à formuler un plan de vie, qui comprend une stratégie visant l’accomplissement de leurs propres projets, que ce soit au centre, au sein de leurs familles ou au niveau de la municipalité.
Dans la journée, nous avons assisté à des conférences sur la vie économique et l’histoire du Nicaragua. Nous avons entendu un ancien combattant de la guerre des Contras nous parler de batailles auxquelles il s’était joint, y compris celle où il a perdu une jambe en marchant sur une mine. Et notre journée déjà fort bien remplie fut couronnée d’une représentation de théâtre et de danse spéciale à laquelle nous avons assisté avec d’autres membres de la communauté.
Horizons d’amitié est le seul organisme de développement à s’être engagé à long terme envers le centre. Lorsque Patricia Rebolledo, de l’organisme Horizons d’amitié, arrive en autobus, les jeunes lui sautent au cou. Un grand nombre des adultes qui dirigent actuellement le centre sont là depuis leur petite enfance. Ils ont grandi sous ce partenariat avec Horizons. Il est difficile de s’imaginer ce que la jeunesse de Nandaime ferait sans.

Patricia Rebolledo reçoit une plaque en céramique et un certificat en reconnaissance des 40 ans d’Horizons d’amitié
Le Nicaragua a toujours eu de la peine à retenir l’attention de la communauté internationale de développement. Le gouvernement a ses propres conditions en ce qui concerne la participation de tels organismes, et nombre d’entre eux ne sont pas disposés à les suivre. De nombreux ONG européens préfèrent concentrer leurs efforts en Afrique plutôt qu’en Amérique centrale.
Après un spectacle surprise présenté par les enfants et les jeunes pour commémorer le 40e anniversaire d’Horizons d’amitié, Patricia a promis qu’Horizons d’amitié continuerait d’être là pour les enfants et les jeunes de Nandaime.
Elle a ensuite remercié ceux qui, à leur tour, ont appuyé Horizons d’amitié, y compris les membres du mouvement syndical.
Le sort de ces enfants et de ces jeunes a été transformé à tout jamais grâce au travail fait dans ce centre. La prévenance et la gentillesse des jeunes que nous avons rencontrés nous ont vraiment épatés.
Avec le gouvernement Harper qui coupe de plus en plus ses liens avec des groupes comme Horizons d’amitié, il est peut-être temps que les organismes progressistes du Canada réalisent qu’ils ont eux aussi des responsabilités à assumer au-delà de nos propres frontières.
Demain, nous prendrons l’avion pour nous rendre dans un ancien territoire britannique, sur la côte antillaise, où nous passerons les trois prochains jours.
Cliquez ici pour lire les autres articles de cette série :
Jour 1 – Dans l’éclair du moment
Jour 2 – Un sens de persistance
Jour 3 – Et puis la poule est arrivée